Un redressement fiscal frappe le rugby français
C’est une nouvelle fracassante qui secoue le monde du rugby en France. Un avertissement fiscal massif de 20,7 millions d’euros pèse désormais sur le Groupement d’intérêt économique (GIE) France 2023, la structure en charge de la commercialisation des offres de voyages et d’hospitalité pour la Coupe du monde de rugby. Cette sanction met en péril l’équilibre financier de la Fédération française de rugby (FFR), déjà fragilisé par des pertes conséquentes.
Les détails du redressement fiscal
Le 23 décembre, le GIE France 2023 a reçu une notification de redressement fiscal pour l’utilisation erronée d’un taux de TVA réduit à 5,5 % sur les packages combinant billet et voyage ou billet et hospitalité, alors que le taux correct est de 20 %. Deux opérations principales sont visées. Couleur Voyages, ayant eu l’exclusivité des offres assortissant billets et voyages, et Vinci Stadium, ayant commercialisé en exclusivité des billets de la catégorie Or au Stade de France avec des prestations haut de gamme, sont au cœur de cette enquête. Selon l’administration fiscale, ces entités savaient pertinemment que leurs actions n’étaient pas conformes. En 2019, un rescrit du ministère du Budget avait déjà précisé que le taux réduit n’était pas applicable dans de telles circonstances. Malgré une tentative d’intervention de Jean Castex, délégué interministériel aux grands événements sportifs à l’époque, aucune réponse n’a émané du ministère des Finances.
Conséquences financières pour la FFR
Le fisc attribue au GIE une amende additionnelle de 4,5 millions d’euros pour mauvaise foi supposée, portant le montant total du redressement à 20,7 millions. Ce développement affecte gravement les finances de la FFR, poussant le déficit du GIE de 36 à 57 millions d’euros et augmentant ainsi les pertes de la Fédération de 19 à 31 millions d’euros. Claude Hélias, trésorier adjoint de la FFR, fait part de ses préoccupations quant à cette situation critique. « Provisionner douze millions, ce serait catastrophique. Si ce redressement était mis en recouvrement, la FFR se retrouverait en cessation de paiement », laisse-t-il entendre.
Florian Grill, président de la FFR, partage cette alarme, rappelant les efforts de redressement déjà consentis. La fédération a dû faire des économies, notamment en réduisant les subventions, en gelant certains postes vacants et grâce à des sacrifices des clubs professionnels et des joueurs du XV de France.
Un obstacle fiscal insurmontable ?
Toutefois, Florian Grill se montre particulièrement inquiet face à cette nouvelle charge fiscale qu’il juge insurmontable. « On va devoir provisionner, mais à quelle hauteur ? Nous étions déjà confrontés à un déficit d’exploitation de 18 millions et nous avions trouvé des solutions pour réaliser des économies », explique-t-il. Sous cet avertissement fiscal, la FFR a réduit la subvention de Provale, ne remplace pas les départs au sein de la fédération, a trouvé de nouveaux partenaires, et a obtenu le consentement des clubs pros et des joueurs du XV de France pour une diminution de leurs primes. Grill poursuit : « Mais avec ce redressement de 57 millions d’euros en pertes du GIE, c’est une charge trop lourde. Nous avons une bombe nucléaire menaçant notre structure. »
Le contentieux contesté
La FFR et le GIE contestent le redressement fiscal en affirmant que le billet de match, qui bénéficie d’un taux réduit de TVA, représente l’élément principal des packages vendus, tandis que les prestations additionnelles constituent des services accessoires. À l’inverse, Bercy est d’avis que les prestations additionnelles ne peuvent pas prétendre au taux réduit. La fédération marquerait également son incompréhension devant ce qu’elle considère comme un traitement inégal par rapport aux clubs de football professionnels, qui ont reçu une dérogation pour appliquer le taux réduit de 5,5 % sur les hospitalités.
La procédure risque de s’éterniser, semblable à un précédent conflit fiscal entre la FFR et l’administration concernant la Coupe du monde 2007, qui s’était prolongé sur quatorze ans. Entre temps, la FFR fait face à une situation d’urgence extrêmement préoccupante : à moins qu’une résolution ne soit trouvée rapidement, le rugby français pourrait se voir confronté à de graves difficultés financières, une issue que tout le monde redoute.