La sélection controversée d’Auradou et Jegou : une décision qui interroge
La justice argentine et une sélection controversée
Il n’aura pas fallu attendre longtemps avant qu’Hugo Auradou et Oscar Jegou, qui avaient été arrêtés à Mendoza sous une accusation grave de viol, soient appelés à rejoindre les 23 joueurs en lice contre le pays de Galles ce vendredi pour le début du Tournoi des Six Nations. Le non-lieu rendu par la justice argentine n’efface pas les interrogations qui planent autour de cette décision.
Fabien Galthié, l’entraîneur du XV de France, annoncera ce mercredi à Marcoussis la composition de son équipe et devrait intégrer Auradou et Jegou, probablement comme joueurs remplaçants. Il se prépare à défendre ce choix en soulignant que l’abandon des poursuites permet aux deux joueurs de revenir à la compétition. Bien qu’un non-lieu ait été prononcé en décembre, les complications persistent, car la plaignante a fait appel, et ce recours sera étudié en février.
La dimension symbolique et les réactions dans le monde du rugby
Au-delà des questions juridiques, c’est l’impact symbolique de cette sélection qui divise. Après des incidents aussi notables que ceux de Mendoza, où l’image du rugby français a souffert, nombreux sont ceux qui s’interrogent sur le message que la fédération souhaite véhiculer. Ceci est d’autant plus vrai dans un contexte de lutte contre certains comportements jugés inappropriés, particulièrement pendant les troisièmes mi-temps, et de promotion active du rugby féminin.
Lors de la présentation du tournoi à Rome, Fabien Galthié a défendu sa décision en déclarant : « Je comprends et j’entends les critiques, mais nous assumons pleinement nos choix. Nous ne tenons compte que de la performance ». Ce raisonnement, néanmoins, ne convainc pas tout le monde puisque ni Auradou ni Jegou ne sont des piliers de l’équipe, ce qui alimente les doutes sur la pertinence de leur inclusion.
Les anciens sélectionneurs de l’équipe n’ont pas tous la même opinion. Guy Novès, à la tête de l’équipe de 2016 à 2017, pense que puisqu’ils ont été blanchis par la justice, ils méritent leur place. Philippe Saint-André, sélectionneur de 2012 à 2015, préfère toutefois attendre l’issue de l’appel en février. Jean-Claude Skrela, sélectionneur de 1995 à 1999, est plus tranché : « Je ne les aurais pas sélectionnés. Même blanchis, leur conduite à l’étranger nuit à l’image du rugby français ».
Morale et légalité : un mélange explosif
La polémique ne s’arrête pas à la légalité de sélectionner ces joueurs, elle englobe également un aspect moral conséquent. Lors de cette même tournée, Melvyn Jaminet avait été contraint à une suspension de longue durée suite à des accusations de racisme, ce qui s’était traduit par son exclusion de l’équipe. Florian Grill, président de la Fédération française de rugby, avait alors martelé : « Représenter la France impose des obligations comportementales ».
En ce qui concerne Auradou et Jegou toutefois, Grill choisit de s’appuyer uniquement sur la décision judiciaire. Il a souligné : « Dès le départ, nous avons insisté sur la présomption d’innocence des deux joueurs et la confiance accordée à la justice ». Selon lui, le non-lieu équivaut à une innocence totale, autorisant leur sélection. « La responsabilité de prouver leur culpabilité repose sur la plaignante », affirme Grill, écartant ainsi tout jugement moral.
En conclusion, même si la sélection de ces joueurs respecte la décision des tribunaux argentins, elle continue d’alimenter le débat, notamment sur la gestion de l’image et des valeurs associées au rugby français.