Enquête : Le sexe améliore-t-il les performances sportives ?

« Les Jeux Olympiques sont-ils vraiment un terreau de débauche ? » Les opinions divergent et les études ne parviennent pas à s’accorder. Face à tant de rumeurs, nous avons préféré nous tourner vers des experts avisés pour obtenir des réponses. Par Léa Borie, tiré de Women Sports magazine n°33, édition spéciale JO de Paris 2024.

Introduction au thème de la sexualité pendant les JO

Tous les quatre ans, des murmures surgissent concernant les comportements sexuels des athlètes en marge des compétitions. Il est crucial de souligner que ce dossier a été élaboré dans le respect de la vie privée des sportifs, leur intimité étant protégée. Ainsi, nous avons recueilli les opinions de spécialistes en sexualité féminine concernant les Jeux Olympiques et Paralympiques.

Préserver avant tout

Des préservatifs sont fournis à hauteur de deux par jour et par athlète ! Cette mesure n’a pas pour but d’encourager des activités sexuelles frénétiques, mais bien de protéger la santé des sportifs, tout comme les dispositions anti-attentat. Cette pratique remonte aux Jeux de Séoul en 1988, une période marquée par la lutte contre le Sida. Les maladies sexuellement transmissibles diminuent les performances et augmentent les risques de blessures. La notion de consentement, essentielle de nos jours, a été omniprésente dans notre enquête. Tous les termes employés suggèrent bien une réciprocité.

Il est aussi question de digues dentaires et de préservatifs féminins, marquant une prise en compte plus large des femmes. Erika Lust, réalisatrice et experte en éducation sexuelle explique que « la société a toujours tenté de contrôler la sexualité, particulièrement celle des femmes. Dans le sport, il semble qu’on commence à reconnaître et à briser ce tabou historique, même dans un domaine souvent dominé par les hommes. »

Les récentes contraintes liées à la pandémie de Covid-19 ont redéfini les politiques sexuelles durant les JO. Les Jeux de Tokyo 2021, par exemple, ont imposé des protocoles stricts, déconseillant les relations sexuelles et limitant les interactions entre concurrents. Les athlètes recevaient 50 préservatifs chacun, à leur départ du village seulement.

Sexualité et Jeux Olympiques

Pas uniquement des médailles : le sexe aussi !

Lors des éditions précédentes, les anecdotes sur les rencontres sexuelles sont nombreuses. Par exemple, l’utilisation de l’application de rencontres Tinder a augmenté de 350 % pendant les JO d’hiver de PyeongChang en 2018. En 1994, à Lillehammer, deux coéquipiers de l’équipe allemande de bobsleigh ont proposé à une skieuse américaine de lui offrir leur médaille d’or contre des faveurs sexuelles.

Le point de vue masculin prédomine

Les histoires de chambres d’hôtel et de services de chambre coûteux chez les sportifs masculins sont courantes. Hope Solo, gardienne de but américaine, révélait en 2012 que « les athlètes vivent les expériences intensément, que ce soit en remportant des médailles ou en faisant l’amour. » Susen Tiedtke, athlète allemande, racontait des anecdotes croustillantes des Jeux de Barcelone et Sydney. La vision puritaine de la sexualité féminine explique partiellement l’absence de témoignages similaires chez les femmes.

Les stéréotypes persistants

Beaucoup de sportifs, comme Mohamed Ali, croient que s’abstenir de relations sexuelles avant une compétition est bénéfique pour leurs performances. Cette croyance remonte à la Grèce antique. Cependant, il est prouvé que les rapports sexuels peuvent en fait augmenter les niveaux de testostérone et l’agressivité, et donc les performances.

La privation de sexualité peut avoir des effets négatifs sur le bien-être psychologique des sportifs. Gaëlle Étienne, sexologue, explique que « la sexualité est essentielle, comme manger ou dormir. La priver pourrait induire des défaillances psychologiques, même si cela peut agir comme un placebo. » Le traitement de la question de la sexualité rappelle parfois une approche parentale restrictive.

Sexualité féminine et considérations pratiques

La sexologue Margot Maurel explique que la sexualité féminine reste mal étudiée. Les femmes sont souvent perçues par rapport aux risques de grossesse ou aux règles douloureuses, ignorées dans les discussions sur la puissance et l’agressivité. Elle souligne que le stress influence la libido des femmes, et que contrairement aux hommes, elles n’éprouvent pas la peur de perdre leur puissance sexuelle.

Importance de la modération

Les rapports sexuels n’épuisent pas les athlètes autant que certains le pensent. Isaline Sager-Weider, volleyeuse française, affirme que le sexe l’aide parfois à mieux dormir avant un match. Cependant, elle souligne la nécessité de doser et d’adapter sa pratique sexuelle à ses obligations sportives. Erika Lust recommande que les athlètes écoutent leur corps et leurs préférences. Un rapport sexuel modéré peut avoir un effet relaxant bénéfique.

Facteurs d’âge et de tempérament

La majorité des sportives des Jeux sont jeunes et planifient de nombreux aspects de leur vie, incluant leur cycle menstruel et leur vie sexuelle. Les troubles sexuels peuvent nuire à leur performance. La notion de plaisir sexuel diffère également entre hommes et femmes, ces dernières étant souvent plus insatisfaites.

Par ailleurs, Sébastien Landry rappelle que les athlètes peuvent être réticents à dévoiler leur vie privée à cause des dangers de la diffusion non consensuelle de leurs images intimes.

Sexualité bénéfique

Selon la Fédération française de cardiologie, l’activité sexuelle maintient le cœur et les artères en bonne santé. Les endorphines générées diminuent les douleurs et favorisent le sommeil. Gaëlle Étienne précise que « l’activité sexuelle, en réduisant le stress, peut apporter une bonne humeur bénéfique au niveau sportif. » Pour Pauline Schillaci, l’athlète cherche avant tout un moment de libération.

Il est important de ne pas faire de la sexualité un sujet central. Les sportifs, en plus de gérer leur performance, leur alimentation, et leur sommeil, pourraient être écrasés par une surveillance stricte de leur vie sexuelle. La masturbation, vue parfois comme une méthode de gestion du stress, peut également se révéler courante dans le milieu sportif.

Sport et libido : un tandem gagnant ?

L’activité physique régulière stimule la libido. Cependant, le surentraînement peut la réduire. Gaëlle Étienne note que les excès dans l’entraînement peuvent causer une baisse de libido, le cerveau priorisant le repos. Pauline Schillaci précise que pratiquer le sport et la sexualité exploite des hormones similaires, reliant étroitement ces deux aspects de la vie.

Sébastien Landry ajoute que les athlètes de haut niveau peuvent être trop fatigués pour maintenir une libido élevée. Le surentraînement nuit aux envies sexuelles, alors que le repos devient une priorité.